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Ponzi Scheme, de Jesse Li (2015)


AmandaDesignsGames

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À l'université, j'ai eu un cours de socio-linguistique, sur l'impact de la culture sur la langue, et vice versa. Un des meilleurs exemples du sujet est le mot allemand Schadenfreude, qui se traduit comme "le bonheur qui vient du malheur de nos amis". Si vous vous identifiez à ce sentiment, Ponzi Scheme est pour vous.

Dans Schadenfreude Ponzi Scheme, les 3 à 5 joueurs sont des arnaqueurs, à la recherche d'investisseurs pour leur système pyramidal. Le thème est... secondaire. Les joueurs, au final, promettent à ces investisseurs des retours démesurés, et tentent de ne pas être celui qui finira avec des bottes de ciments dans le fond du fleuve en premier. Quand un joueur ne peut plus payer, il est éliminé, et l'adversaire avec le plus de points l'emporte.

Je vous expliquerai maintenant les mécaniques, mais ce n'est pas à ça qu'il faut s'attarder: c'est aux situations qui ressortent de l'interaction entre celles-ci.

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À chaque tour, un joueur peut "signer" un investisseur en prenant un chevron. Il existe quatre types d'investisseurs, représentés par la couleur du chevron. Ces chevrons sont votre façon de faire des points: en fin de partie, dans chaque couleur, le premier chevron vaut 1 point, le deuxième 2, et ainsi de suite. De prendre un Chevron vient aussi avec une carte d'investisseur:

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Si le chevron est le premier que le joueur a de cette couleur, on prend une carte de la rangée du haut; le deuxième, de celle du centre; le troisième, de celle du bas, et les cartes sont toujours placées en ordre numérique: c'est thématique, avant de signer un gros poisson, il faut . Les cartes d'investisseurs donne un montant d'argent, mais demande un retour: par exemple, la première carte de la première rangée donne un investissement de 9$, mais demande 8$ de retour à chaque 5 tours, soit 17.78%. Par comparaison, celle du bas donne 53$, mais demande 75$ de retour aux 3 tours, soit 47.17%. Mais comment est-ce que je peux lui payer ce 75$ là? Et bien, facile, en prenant un autre investisseur, comme son voisin, qui vous offre 80$, à un faible 60% d'intérêt. 

Oh oui, vous allez buster. À fond la caisse. Mais c'est comme quand on croise une maman ours avec ces bébés: faut pas courir plus vite qu'elle, juste plus vite qu'un de vos chums. Si vous êtes peu athlétique, comme moi, avant de partir à la course, baissez les culottes du voisin et poussez-le. C'est aussi la stratégie dans Ponzi: si vous êtes en train de vous noyer dans la marde, sortez vous en tirant sur celui qui est le plus proche.

J'en ai plein des allégories comme ça. 

Alors comment on noie ses amis? À chaque tour, chaque joueur peut faire prendre la petite enveloppe de cuirette, mettre de l'argent dedans, et la proposer à son adversaire en pointant une couleur de tuile dont les deux possède au moins une copie. Le receveur d'offre a deux choix: prendre l'argent, et donner une tuile de cette couleur; ou prendre une tuile, et donner cette quantité d'argent.

Le puzzle est complet, vous savez jouer. Maintenant, parlons des situations qui ressortent de ce set de règles:

- Je fais une offre à Alice pour 20$ pour son bleu. Elle me vend son bleu. À son tour, elle me propose de m'acheter mon bleu pour 5$. J'ai pas 5$, je suis obligé de lui vendre la tuile que je viens de lui acheter, à perte.

- Je vois que Bob doit rembourser 80$ à son prochain tour, et 65 le suivant. Je lui fait une offre super basse, espérant qu'il ne peut pas se permettre de me payer dans des temps si durs.

- J'ai 60$ en main, mais je dois rembourser 72$ à la fin du tour. Je fais une offre de 12$ à Carla pour sa tuile valant le plus, espérant qu'il paie pour mon intérêt.

- Dans 3 tours, Donna a 300$ à rembourser. Je prend alors une carte de 65$ à payer dans 4 tours: le jeu ne se rendra pas jusque là.

- Comme la ligne du haut, mais le jeu se rend jusque là finalement.

- Éric a un gros remboursement à faire, et seulement 3 tuiles, toutes de la même couleur. "Si tu me la vends, tu pourras te prendre un gros investisseur". Et, bien sûr, une offre insultante avec.

- J'ai 15 points, et Fernando en a 17. Je lui fait une offre pour une tuile qui lui vaut un point, mais m'en vaut 3, pour passer devant lui. 

Et si ces situations ne vous convainquent pas: À chaque tour, le premier joueur peut discarter une carte d'investisseur du marché. Si, à la fin du tour, il y a au moins autant de cartes rouges (les plus grosse cartes du paquet) que de joueurs, on avance de deux tours plutôt qu'un: les paiements sont réclamés plus vite que prévu!

 

J'ai joué à Power Grid, mon jeu préféré, trois fois dans le dernier mois. Des bonnes games, tendues, serrées. J'ai joué une partie de Ponzi pendant ce mois-là, et faut que j'avoue que j'ai jamais autant eu de plaisir pendant une partie de Power Grid. Peut-être que je dois réorganiser mon top 30...

D'un point de vue "gros fun sale", je pense que Ponzi Scheme se trouve dans une situation particulière: plus que n'importe quel jeu, il dépend des joueurs qui y jouent. Il faut être agressif dans ses offres, il faut être rapace, il faut tenter de gagner, et non pas seulement de ne pas faire faillite, et il ne faut pas prendre mal quand nos amis nous noient dans la marde. Et surtout, il faut développer un syndrôme de Latourette pendant le jouer: si y passe 5 minutes sans un sacre et une proclamation de haine, le jeu plante. Et quand il plante, il plante solide. Et c'est pas tout le monde qui est intéressé à s'envoyer chier entre chums, à avoir des sueurs froides pendant une partie, mais si 3-5 de ces personnes se retrouvent dans une même pièce il n'y a pas de façon de passer un meilleur moment que de jouer à Ponzi Scheme.

D'un point de vue "qualité de design", je dirai ceci: la synergie entre les trois mécaniques (les prêts usuriers, les offres Shotgun, et le scoring triangulaire des tuiles) est parfaite. Le jeu repose en équilibre au joint entre ces trois mécaniques, et sans l'une d'entre elles, rien ne tient. Par contre, il n'y a rien qui dépasse sur quoi ajouter une mécanique: le jeu est à la fois simplifié au maximum, et étendu à son maximum. Le design est, à mes yeux, littéralement parfait.

Pour moi, c'est un 10/10.

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Faut voir la critique que Vasel et l'autre font de Ponzi scheme. C'est drôle Tom comprend fuck all au jeu. J'ai réagi pareil à ma première partie mais on m'a gentiment reexpliquer et là ça va. 

Le jeu est un brin cher pour son matériel par contre. J'aimerais bien y rejouer maintenant que j'ai catché le principe. 

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Comme je disais, c'est clairement pas un jeu pour tout le monde, et j'aurais mis ma main au feu que Tom Vasel était dans ce "pas tout le monde". Quant au prix, deux choses: un, j'ai trouvé le mien dans un Ding and Dent pour 15$, donc j'ai ce biais, mais de deux, je fais rarement cette analyse pour les jeux que j'aime autant: j'aurais pris un argent de meilleure qualité, mais je ne regretterais pas davoir mis 50$ sur ce jeu vu à quel point je l'apprécie.

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  • 11 months later...
il y a une heure, pombo a dit :

Merci Jvallerand pour le review, tu m'as mis la puce à l'oreille et je l'ai finalement acheté et joué, bien aimé notre première partie, même si je suis tombé bankrupt avec 38 points...

Il faudrait que tu le ramènes à Longueuil à l'occasion. Les jeux de négociation ne sont pas vraiment ma tasse de thé habituellement, mais la mécanique de celui-ci m'intrique et j'aimerai bien l'essayer une fois pour voir.

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13 minutes ago, SuperFafa said:

Il faudrait que tu le ramènes à Longueuil à l'occasion. Les jeux de négociation ne sont pas vraiment ma tasse de thé habituellement, mais la mécanique de celui-ci m'intrique et j'aimerai bien l'essayer une fois pour voir.

C'est pas tellement négotiation. Plus une mécanique "je coupe, tu choisis", mais tu dois faire une approximation de combien d'argent les gens vont avoir pour faire l'offre la plus avantageuse pour toi. Mécanique très simple, mais pas évidente à bien exécuter. Oui je l'ammènerai la prochaine fois que je viendrai à Longueuil.

 

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En fait je pense que c'est à mi-chemin entre négociation et "coupe-choisis". C'est un peu comme dans Isle of Skye/Castles of Mad King Ludwig, dans lequel tu détermine le prix, mais dans celui-ci, tu ne sais pas dans quel sens la transaction va aller! Bref, tu dois lire la situation et en venir à une offre, comme dans un jeu de négo, mais y'a pas ce "je t'en donne 5$" "non, je veux 12", "non 8". Qui rend tant de jeux de négo, selon moi, interminable.

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il y a une heure, jvallerand a dit :

En fait je pense que c'est à mi-chemin entre négociation et "coupe-choisis". C'est un peu comme dans Isle of Skye/Castles of Mad King Ludwig, dans lequel tu détermine le prix, mais dans celui-ci, tu ne sais pas dans quel sens la transaction va aller! Bref, tu dois lire la situation et en venir à une offre, comme dans un jeu de négo, mais y'a pas ce "je t'en donne 5$" "non, je veux 12", "non 8". Qui rend tant de jeux de négo, selon moi, interminable.

Tant mieux s'il évite cet aspect, c'est justement ce qui me repousse dans les jeux de négo...

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j'adore ce jeu, il n'a pas d equivalent. C'est rigolo, chaotique, negociation feeling, et je perds tout le temps.

Et thematiquement, c'est parfaitement dans le theme.

Y a une v2 en cours de KS avec un theme de dragons... je l'ai jouee a Origins j ai ete moins convaincu car c'est moins lisse que cet opus si particulier

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